27/1- 02 The end of the world
De Russell T. Davies
Réalisation : Euros Lyn
Imaginons faire un bond de 5 milliards d’années en avant, que le soleil se dilate pour devenir la géante rouge qui va consumer la Terre (pas trop dûr, c’est un peu ce qui va se passer) et qu’on puisse assister à l’événement en direct. Techniquement, la fin ne sera pas aussi spectaculaire, mais il se trouve que des industriels avaient prévu des protections pare-soleil jusqu’au moment fatidique. Pour impressionner Rose, Le docteur l’emmène pour son premier voyage sur cette station ou se déroulera devant elle la fin de la Terre. L’occasion de croiser le gotha invité à la fête, quelques bonnes têtes d’aliens (dont Face de Boe qui fait ici sa première apparition) et Cassandra O’Brien qui se dit être la dernière humaine pure dans un monde dominé par les mélanges humains/… non humains. Rose finit par se poser des questions sur ce mystérieux extraterrestre qui l’a conduite au milieu de cette cérémonie de dingues, si loin de tout, même si quelques standards musicaux de son époque ponctuent la cérémonie. Mais voilà qu’une personne malveillante introduit au coeur du vaisseau des robots saboteurs qui lèvent les boucliers anti-soleil de la station…S’engage une course qui fera oublier à la jeune londonienne que non loin de là, sa planète natale est en train de mourir.
Mieux que les chutes du Niagara. La fin de ta planète !
Pour ce second épisode de la nouvelle série, Russell T. Davies fait une entrée franche, bien décidé à prouver le plus tôt possible ce dont son Dr Who est capable, et accessoirement aux plus jeunes téléspectateurs ce que le TARDIS a dans le ventre. A l’instar de Rose, nous sommes transportés en peu de temps du foyer londonien à l’époque présente à la fin du berceau de l’humanité, sans coup de semonce, et à peine le temps de se rendre compte de l’ampleur de ce qui se passe, nous voilà projetés dans une action menée tambour battante, dans un suspens très bien géré qui souffle aussi bien le drame que la comédie. Loin de la dynamique serial des arcs classiques, le défi de Dr Who 2005 est de faire de chaque épisode (ou double-épisode) un mini-blockbuster avec les moyens du bord, pour une durée de tournage de seulement un mois (pour la première fournée) et un budget peu élevé par rapport aux séries américaines. Le contrat est pourtant rempli et possède une belle facture visuelle, avec pas moins de 203 plans d’effets visuels. Les aliens sont totalement décomplexés (génial Moxx of Balhoon) et Russell T.Davies n’hésite pas à manier l’absurde, à l’instar de ses prédécesseurs. On pense notamment au ballet des représentants aliens de Peladon, mais en plus réussi. Même dans l’univers fourmillant de Doctor Who, the End of The World est une mine d’inventivité. On y découvrira pour la première fois le psychic paper. On y trouvera même une incursion pop inhabituelle dans l’utilisation de « Tainted Love » ou « Toxic » comme de la musique classique, une façon comme une autre de s’attirer la complicité du spectateur autant que celle de Rose.
Faut-il arrêter la chirurgie esthétique ?
Une autre première dans la série, qui coupait volontairement les compagnons de leurs origines : Le pont avec le présent est créé avec le téléphone trafiqué du docteur qui permet à Rose de communiquer avec ses proches. La compagne n’est plus une victime accidentelle des aléas du TARDIS (le neuvième Docteur en a d’ailleurs le parfait contrôle) ou d’un Docteur caractériel mais une jeune femme qui accepte de prendre part au voyage, telle une Alice suivant le lapin blanc dans son monde étrange. Et là évolue la teinte de doctor who. Ce Docteur 2005 tire vers le merveilleux, éludant pour le compagnon toute séparation dramatique pour la plonger dans l’ivresse de ce nouvel univers et de la découverte. Qui ne rêverait pas d’avoir le beurre et l’argent du beurre, l’espace et le temps à l’échelle de la Terre, puis la possibilité de rentrer chez soi en un claquement de doigt. Dès lors qu’elle parle à sa mère, Rose se résout peu à peu à plaisanter et lâche la bride au Docteur. On pourra donc se concentrer sur les voyages et profiter du naturel désarmant de Billie Piper, qui dès cet épisode se pose comme le contrepoids humain d’un Docteur volant du plus grand enthousiasme au fatalisme.
Une petite folie pour la jet set de l’an 5 milliard, et puis au lit
« Everything has its time and everything dies », dit Nine lors de la fin brutale de Cassandra. Sa phrase renvoie à la fin de la terre, à l’importance relative de notre époque (superbe juxtaposition entre la désolation du vaisseau et le plan de foule du présent) et à la fin de Gallifrey qu’il a vécu il y’a peu. En montrant à Rose la relativité de toute chose et la précarité de l’existence, Nine lui a présenté ce que peut être son point de vue, celui du seigneur du temps si évolué pour qui l’espace et le temps ne sont plus des limites. Russell T.Davies dévoile le drame de la guerre du temps avec la même pudeur, dans une larme significative de Christopher Eccleston. Tout prépare à cette discussion finale entre lui et sa compagne où il se confie enfin sur la disparition de sa planète et des siens. Cette scène permet à Murray Gold de briller pour la première fois dans son interprétation du thème musical de Rose. On y ressent un peu de cette nostalgie qui habite la compagne et le Docteur au final de l’épisode. Et beaucoup de la complicité qui sera la leur, unique dans l’histoire de la série. Les choses sérieuses peuvent commencer…
N : 9
IM : 8
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