28 / 2-12 & 13
Army of ghosts & Doomsday (2 épisodes)
De Russell T. Davies
Réalisation : Graeme Harper
1865. La reine Victoria crée Torchwood pour protéger le pays contre le Docteur et les manifestations aliens qui mettraient en danger le royaume. 2006. L’institut est devenu une gigantesque police secrète qui a récemment construit une tour dans le but d’exploiter une faille d’énergie. Cette faille est un void qui mène sur une autre dimension et par lequel se sont engouffrés d’étranges fantômes à travers le monde. Après la panique, les gentils humains ont fini par adopter ces fantômes, reconnaissant en eux des proches disparus. C’est cette histoire de retour des morts qui mènera le Docteur à Torchwood. Pris au piège dans le sanctuaire avec Rose et Jackie, il découvre que l’Institut contrôle les apparitions des fantômes et il entre en contact avec une étrange sphère trouvée par l’institut. La sphère, qui n’a ni masse et ni existence physique dans ce monde est coincée dans le void qui sert d’accès aux fantômes. Manipulés, les fonctionnaires de Torchwood ouvrent la brèche et dévoilent en lieu et place des fantômes une armée de cybermen venus du monde parallèle dans lequel Rose et le Docteur avaient laissé Mickey. Au même instant, la sphère se matérialise et s’ouvre sur quatre Daleks du culte de Skaro échappés de la guerre du temps et transportant une étrange technologie TimeLord. Piégés entre l’invasion des cybermen et la campagne d’extermination des Daleks, Ten, ses compagnons et Torchwood devront s’unir dans la bataille de Canary Wharf, qui se mènera de front sur deux dimensions.
Ze Ultimate Death Match
Le double épisode qui clôt cette saison 2 est un condensé de mythologie, faisant converger sans temps morts le retour de grands habitués et la venue d’événements attendus: la rencontre annoncée de Torchwood et du Docteur, le retour des Dalek, des cybermen, de Mickey Smith, d’Alterna Peter Tyler etc… Il y’est fait référence aux dimensions parallèles et à leurs dangers, à la technologie des seigneurs du temps ainsi qu’aux radiations émises par les voyageurs du temps. Chaque élément trouve naturellement sa place dans l’histoire et s’incorpore magistralement au scénario. C’est un peu l’avènement du relaunch qui se produit devant nos yeux, une osmose entre le show qui se nourrit de lui-même et le spectateur qui parle son langage (Revers de la médaille, ça doit être un gros bordel pour le néophyte). L’affrontement entre des « DELETE » et des « EXTERMINATE » devient un grand moment de télévision. On sourit en comprenant que les fantômes sont des cybermen bien avant la fin, sans se douter qu’à l’issue d’une variation paroxystique des happenings de la série classique, ils dissimulent eux-même l’immixtion des daleks. Ne parlons pas du moment où l’arche de Genesis s’ouvre sur des centaines de Dalek dans une belle pirouette de Russell T. Davies. Mais l’épisode ne capitalise pas uniquement sur la rencontre des deux ennemis historiques du Docteur, loin s’en faut.
La boule, ou l’insoutenable instrument du suspens
L’émotion est aussi au rendez-vous avec les retrouvailles de Peter et Jackie Tyler, désormais tous deux veufs. On est heureux de revoir un Mickey Smith sans peur et (pas tout à fait) sans reproches. Il le dispute à l’humour, avec des dialogues parmi les meilleurs de la série, l’astucieuse utilisation de vieilles lunettes 3D ou bien Jackie qui prend la place de sa fille comme compagne le temps d’un demi-épisode. L’épisode joue aussi très bien de l’ironie du destin de Torchwood et du non-sens de cette institution personnalisée par Yvonne, véritable soldat au service de l’Empire (!) anglais. Doctor Who amène encore une fois la propension des terriens à précipiter leur perte par leur croyance en des superstitions débiles. On ne peut donc guère détacher une seule seconde les yeux de ce dyptique. Tout ça avec un budget qui paraît ridicule en comparaison du résultat et une production encore faible par rapport à l’époque Moffat à venir. Saluons donc l’impeccable dramatisation d’une simple élément de décor (une boule) sur près d’un épisode et l’habile utilisation d’un seul décor pour deux mondes.
« Putain les enfoirés. Ils vont pas faire ça ?! »
Et puis vient la fin. Comme on le sait, c’est la dernière aventure de Rose. Ainsi que la Bête l’a prophétisé et que Rose elle-même l’a annoncé en début d’épisode, l’aventure se conclura par sa mort. Mais le pas de la mort d’Adric ne sera pas franchi, celle-ci sera symbolique. Au moment où le Docteur décide de refermer le void pour y emprisonner Daleks et Cybermen, Rose refuse de rester avec alterna-Pete, sa mère et Mickey à l’abri dans l’autre dimension. Ainsi est-elle exposée à y’être emportée avec le Docteur. Elle passe très près de cette mort, mais Alterna Peter Tyler la sauve in extremis pour l’emporter dans son monde juste avant que celui-ci se ferme pour toujours. On voit ensuite Rose et le Docteur dans le même lieu, mais séparés par deux mondes différents qui ne pourront plus jamais se rejoindre. Puis le contact se prolonge par des adieux irréels dans une scène superbe, dans laquelle le Ten avoue avoir brûlé un soleil pour pouvoir lui faire ses adieux. Le temps se suspend sur ces derniers instants, l’une sur une plage au bout du monde (ironiquement appelée Bad Wolf Bay), l’autre en équilibre précaire près d’une supernova, se quittant sur un semblant de déclaration de leurs sentiments réciproques.
And the Oscar goes to…Murray Gold (et Billie aussi, of course)
Rose a toujours été de l’avant, se souciant peu de ce qu’elle pouvait devenir la nouvelle Sarah Jane Smith. Elle a coupé progressivement les ponts avec ses proches pour s’imaginer vivre éternellement ce voyage. La réunion de ceux-ci ne peut plus être une récompense pour elle. C’est aussi un vrai crève- cœur pour le spectateur, encore aggravé par ce bon vieux Murray Gold qui convoque le BBC Wales Orchestra dans un bel hommage musical. Plus que cette convergence scénaristique impressionnante, Russell T.Davies a réussi ce que la série classique n’avait pas réussi à faire : Pour la première fois, le départ d’une compagne est aussi important que celui d’un Docteur. Avec le départ de Rose, c’est aussi l’histoire d’un bon paquet de réguliers qui se clôt. La saison 3 verra donc un renouvellement complet des seconds rôles et un nouveau défi pour la team de Russell T. Davies et Julie Gardner, attendus au tournant comme jamais. Nous ne sommes qu’en 2006 et le relaunch est déjà bien installé.
N : 9
IM : 9
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